Les personnages de Là où le soleil se couche vivent comme nous dans le monde de la compétition capitaliste écocide, du repli sur soi et de la peur de l’Autre.
Qu’ils soient artistes ou kamikaze, viticulteurs, tradeur ou historien, qu’ils aient quinze ou septante ans, qu’ils, elles ou iels s’aiment ou se haïssent - ce qui revient parfois au même - ils sont en crise. Ils cherchent une alternative.
La pièce est un règlement de compte transgénérationnel hanté par la nécessité d’une issue.
Une orgie de viande, de vin, de désir, de chansons, d’amour, de mort, d’espoirs vivaces.
Une déclaration d’amour au théâtre, et à la diversité du vivant, sous toutes ses formes.
Une coproduction L'acteur et l'écrit avec Central, La Coop asbl et Shelter Prod.
Avec le soutien de la Cocof, de la commune d'Ixelles, du CAS, du théâtre des martyrs, de la compagnie Biloxi 48, du Théâtre de Poche, de la Loterie Nationale, du taxshelter.be, ING et du taxshelter du gouvernement fédéral belge.
Jean-François Massy a quarante cinq ans. Il est fils d’ouvrier. Il est transformiste. Il n’exerce pas son art dans un cabaret de la capitale, mais dans les petits villages de la Wallonie Picarde de son enfance. Ducasses, foires aux boudins, fêtes diverses ... Partout, quelles que soient des conditions de travail parfois franchement improbables, Jessie Jess, assure le show. Dans une loge improvisée, son créateur, dévoilant sa technique de transformiste, devient sous nos yeux, son double travesti. Au fur et à mesure que le corps se féminise, que les gestes deviennent plus amples, l’humour plus spectaculaire, dans cette langue truculente qui n’appartient qu’à elle, Jessie révèle son quotidien d’artiste, sa vie de troupe. Sous le masque libérateur de Jessie, Jean-François raconte une autre histoire. Plus intime. Par touches impressionnistes, affleure la confession d’un petit wallon, discriminé à l’école pour sa différence, qui s’est inventé un avatar pour survivre et, finalement, se trouver. C’est l’histoire d’une émancipation. Sans «retour» dans cette région puisqu’il ne l’a jamais quittée. Le courage, parfois, c’est de rester.
Avec l'aide du Ministère de la Fédération Wallonie Bruxelles.
En 1999, Michèle Fabien adaptait pour notre compagnie l’Œdipe sur la route de Henri Bauchau. Elle est décédée brutalement quelques jours avant la première du spectacle. Vingt ans plus tard, nous ne voulions pas manquer cet anniversaire. La même saison devait se créer ce qui fut sa dernière pièce: Charlotte. La pièce évoque la dernière impératrice du Mexique, fille de Léopold Ier, qui fut considérée comme folle et termina ses jours à l’âge de quatre- vingt-sept ans, confinée au château de Laeken. Cette grande oubliée de l’Histoire, donne à Michèle Fabien l’occasion d’aborder de multiples thématiques en les croisant : la condition féminine, les inégalités sociales, le rapport nord sud, le genre. La pièce tire le parti maximum du dispositif théâtral. Elle ressemble à une improvisation à la fois jouissive et tragique. Elle débute par ces mots : «Y a-t-il une actrice dans la salle ?». Elle appelle naturellement un traitement performatif. Nous la jouons sur le plateau nu.
Une production de L'acteur et l'écrit
Soutenue par la Maison poème, la COCOF, le Théâtre de la Vie, le Théâtre Marni, le Rideau de Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature et Arts² (Ecole Supérieure des Arts à Mons).
Avec l’aide du Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles
NOTE
FAMILLES
Le théâtre que nous pratiquons, s’il est documenté, n’est jamais documentaire. Il expose des conflits dont la résolution ne peut se produire qu'au-delà du théâtre, dans la vie et dans la société. Ce type de théâtre n’apporte pas de réponse. Sa vocation est d’agir, au sens poétique, de troubler et de poser question. Nous croyons aux pouvoirs du drame et de la fiction.
La pratique de l’art dramatique est le dispositif où s’incarnent le mieux les rapports sociaux. On y constitue une communauté provisoire. On en vit les contradictions. On y redécouvre les vertus du conditionnel et de l’utopie. C’est un espace/temps où on fait société ensemble.
L’œuvre, c’est la représentation, pas le spectacle. Celle-ci s’ancre dans le sensible. L’enjeu est moins d’informer ou de communiquer que d’organiser des rencontres réelles en stimulant des potentialités. Il s’agit moins de traiter de sujets de société que de traiter de la société elle-même comme sujet.
Le drame incarne des conflits. Il cultive les analogies entre les oppositions de genre et de génération qui éclatent dans les familles et les crises que traverse la société. Il met des mots sur les déchirements de l’adolescence en leur conférant une signification historique et politique. Dans la famille, l’expérience se transmet par la chair et les émotions ; la guerre et l’amour coexistent; le désir circule, entraînant le besoin de transgression de la loi. La survie de la famille, comme celle de la société, dépend de l’apport biologique et culturel indispensable de l’Etranger, son meilleur ennemi.
La famille unit autant qu’elle divise. La question familiale intéresse tous les publics. Ce sera le terrain d’expérimentation de L’acteur et l’écrit sur la durée de notre contrat de création.
Un travail sur la famille contemporaine implique le mélange des genres, des générations et de la diversité culturelle et sociale.
Le modèle familial occidental est la famille bourgeoise. Le mariage civil - issu du code napoléon - en scelle le destin et assure la transmission de l’héritage, c’est-à-dire du capital. Le pouvoir bourgeois repose sur la défense de la propriété privée et les droits des individus. Il s’incarne dans la démocratie libérale dont le modèle prétend à l’universalité alors même qu’il génère l’inégalité et détruit la planète. Il est problématique.
Une compagnie de théâtre, c’est souvent une aventure générationnelle. Dès les années ‘80, pourtant, j’ai eu l’opportunité de travailler avec des artistes beaucoup plus âgés que moi. Aujourd’hui que j’atteins le troisième âge, il est naturel que je me tourne vers ceux qui viendront après moi. Mais il y a aussi des actrices et des acteurs avec qui j’ai envie de poursuivre un travail sur la durée.
Le système de production actuel pousse les intermittents à une productivité démente et ne favorise pas les aventures théâtrales collectives qui durent. Ce projet est pensé avec et autour d’artistes avec lesquels nous avons déjà une histoire, parfois très longue, et qui se sont engagés à participer à au moins deux des cinq créations que nous réaliserons entre 2024 et 2029. Ils ne seront pas permanents, parce que nous n’en aurons pas les moyens, mais récurrents d’une production à l’autre. Il s’agit de Valérie Bauchau, Rachid Ben Bouchta, Lara Ceulemans, Roda Fawaz, Muriel Jacobs, Fabrice Rodriguez et Benoît Van Dorslaer. Des artistes émergents, issus de toutes les diversités, rejoindront les anciens sur chaque création.
Assigné à existence, que nous créerons au Théâtre Jardin Passion en avril 2025, et que nous considérons un peu comme le prologue de ce contrat de création, ne réunira au jeu, à la scénographie, à la lumière et aux costumes que des artistes émergents. C’est un manifeste intime et politique publié par un poète bruxellois belgo-congolais de vingt quatre ans. Une insurrection littéraire contre l’héritage social, écologique et politique catastrophique que laissent derrière elle la génération des boomers, dont je fais partie, à mon corps défendant. Place à la contestation donc, avant La Mouette au printemps 2026 au Vilar et aux Martyrs.
Frédéric Dussenne, novembre 2024